Selon des experts mandatés par le Congrès américain, le syndrome de la guerre du Golfe a bel et bien été causé par des substances chimiques utilisées lors du conflit, et non par un stress psychologique comme cela a longtemps été avancé.C’est à l’évidence un tournant majeur dans la gestion des conséquences sanitaires de la guerre du Golfe de 1990-91. De quoi s’agit-il ? Des experts mandatés par le Congrès américain, emmenés par le Dr. Roberta White (Université de Boston, États-Unis), viennent de confirmer que le syndrome de la guerre du Golfe, cette mystérieuse affection qui engendre chez les vétérans ayant servi lors de ce conflit plusieurs symptômes dont une fatigue chronique, une perte de contrôle musculaire, des problèmes de mémoire ou encore des douleurs musculaires, provient bel et bien de l’usage d’agents chimiques utilisés durant cette guerre. Ces conclusions, rendues publiques le 28 avril 2014, viennent contredire l’hypothèse d’une maladie causée par un stress psychologique, comme cela a longtemps été avancé par les autorités américaines.
Signalons que cette prise de position officielle vient notamment conforter des travaux publiés en mars 2014 par des médecins de l’Université de Californie à San Diego (Etats-Unis), lesquels avaient révélé que cette affection était en réalité issue d’un dysfonctionnement des mitochondries, ces centrales énergétiques situées à l’intérieur des cellules. Un dysfonctionnement qui, de l’aveu même de ces chercheurs ne pouvait que provenir de l’usage d’agents chimiques sur la zone de guerre (lire “Le mystère du syndrome de la guerre du Golfe enfin percé ?”).
En 2008 déjà, ce comité d’experts (le Research Advisory Committee on Gulf War Veterans’ Illnesses, désigné sous l’acronyme RAC) avait pointé l’existence de probables causes chimiques derrière le syndrome de la guerre du Golfe. Le RAC avait notamment avancé l’hypothèse selon laquelle les troubles rencontrés par les vétérans de la guerre du Golfe provenaient de l’usage de substances neurotoxiques sur le théâtre du conflit, dont des pesticides (par exemple utilisés contre la mouche des sables) mais aussi des médicaments administrés aux soldats pour les protéger des gaz de combat qui auraient éventuellement pu être utilisés par l’armée de Sadam Hussein.
Depuis ces premières conclusions, de nombreux autres travaux scientifiques ont été menés. Lesquels ont notamment mis en évidence l’existence de séquelles cérébrales scientifiquement mesurables, comme par exemple une altération des axones, ces prolongements fibreux des neurones qui transmettent l’influx nerveux (lire “Le syndrome de la guerre du golfe a été associé à des altérations du cerveau”). D’une façon générale, le comité RAC est parvenu au consensus selon lequel le point commun entre tous les symptômes du syndrome de la guerre du Golfe réside dans une déficience du système nerveux central. Un phénomène qui pourrait notamment provenir d’une exposition aux gaz sarin et cyclosarin, des substances neurotoxiques connues pour altérer les capacités cognitives.
Dans ce nouveau rapport, les experts du comité RAC indiquent également que le syndrome de la guerre du Golfe ne peut en aucun cas être imputé de façon exclusive à un stress psychologique. Un point important, car durant de nombreuses années, l’argument invoqué par l’administration américaine face à l’ampleur des cas de syndrome de la guerre du Golfe a précisément consisté à invoquer l’existence d’un stress psychologique chez les soldats.
Enfin, le rapport suggère que la destruction du dépôt d’armes irakien de Khamisiyah en 1991, qui contenait de très nombreuses les armes chimiques, pourrait être l’une des nombreuses causes du syndrome de la guerre du Golfe. Là encore, il s’agit d’une avancée notable car jusqu’ici cette hypothèse, bien qu’avancée par plusieurs observateurs, n’avait jamais été considérée comme valide par les autorités américaines (lire l’article en anglais “Khamisiyah: A Historical Perspective on Related Intelligence” sur le site de la CIA).
Source : Le syndrome de la guerre du Golfe causé par des agents chimiques