Cet article va traiter des simulateurs en salle qui équipent tous les régiments de chars Leclerc, ainsi que les écoles et centres d’entraînement. Il se base sur un travail que j’ai effectué en 2011, et a été expurgé des renseignements organisationnels de la formation au sein des régiments Leclerc.
Les simulateurs en salle du régiment comportent un SEE (Simulateur d’Entraînement d’équipage) et un ETT (Entraîneur aux techniques de Tourelle). S’il y a quelques années ces types de simulateurs permettaient une instruction essentiellement technique (Tir, Mise en œuvre) le bon qualitatif est important avec la rénovation et s’apparente à une rupture technologique.
Rupture technologique parce que si précédemment chaque matériel pouvait donner lieu à l’étude puis la fabrication d’un simulateur spécifique, le système rénové repose sur une interface commune qui peut être adaptée sur tous types de matériels. Les coûts de développement pour l’adaptation sur d’autres matériels futurs en seront donc réduits.
Rupture technologique aussi de part les innovations introduites :
- Terrain dynamique : ce qui veut dire que les tirs d’artillerie font des trous, mais aussi qu’il est possible de creuser la base de donnée tant pour faire des embossements que des fossés anti-char par exemple.
- Une base de données système d’arme très performante, incluant en particulier des comportements, des formations et changements, des attitudes …. Qui font que l’ENI face aux équipages dispose d’une réelle autonomie en fonction des scénarios crées.
- Une gestion fine des camps incluant AMI / ENI / NEUTRE et … indéterminé avec des basculement d’alliance possibles en cours de scénario.
- Des effets du champ de bataille nombreux, les tirs d’artillerie (explo ou fumigène), les mines, les missiles filoguidés effectivement etc. …
- La gestion de la météo, le brouillard et les nuages volumétriques (densité en plafond/plancher), la pluie et ses effets sur les optiques, la neige, la température etc. …
- La gestion fine de la date et de l’heure, influant sur la visibilité lors de la création d’exercice, ou le changement en temps réel pour introduire des niveaux de visibilité la nuit.
- Un ennemi générique conforme aux dernières versions de l’ennemi d’instruction, essentiellement glaise ( pour les connaisseurs uniquement ) au simulateur.
- De très nombreux objets et véhicules, y compris civils, ainsi que des fantassins et personnels faisant partie des différents camps.
- L’intégration de la NEB ( Numérisation de l’espace de bataille) au SEE avec l’utilisation du SIT( Système d’information terminal ) tant au poste chef de char que du poste subordonné déporté avec l’instructeur [VBL typiquement, mais aussi tout type de véhicule(s)/personnel(s) en fonction du scénario]
Ci-après le poste instructeur d’ETT école. Le régiment ne dispose pas de l’outil de supervision (la baie de moniteurs en partie supérieure), comme tous les régiments, mais ce besoin avéré fera l’objet d’une évolution future.
Il y a quatre cabines, chaque cabine simulant les postes chef et tireur. Le pilote n’est pas figuré, même si techniquement l’équipage peut être déplacé dans la base de donnée terrain par l’instructeur.
L’ensemble repose sur une architecture clients/serveur reliés en réseau haut débit et des unités centrales de type PC. Chaque poste élève comporte 13 PC, en rajoutant le serveur l’ETT régimentaire comporte donc 53 PC IntelCore i7 de 2,8 GHz avec 3 Go de mémoire vive. Ils tournent tous sous un système d’exploitation 64 bits Windows©
Le logiciel étant commun entre le SEE et l’ETT, l’architecture d’un SEE est globalement la même, avec des spécificités permettant d’inclure le pilote, de gérer les mouvements et de rajouter les fonctions liées à la numérisation de l’espace de bataille.
Comme il n’y a qu’une cabine équipage, le nombre d’unités centrales est de 31. Ils ont la même configuration matérielle que l’ETT.
Il y a donc 84 PC faisant tourner l’ETT et le SEE régimentaire .Il y a bien évidemment de nombreux autres matériels nécessaires au fonctionnement, l’ensemble étant décrit dans les notices techniques.
Ci-après un poste instructeur du SEE avec un poste subordonné :
Il y a lieu de rajouter le poste d’observation, situé à gauche du poste instructeur au régiment (Ce poste servant aussi au rejeu éventuel):
Le logiciel étant commun entre le SEE et l’ETT, les possibilités pédagogiques des simulateurs sont quasiment identiques, la différence principale étant que le SEE représente un char complet équipé d’icône , avec le pilote , et que son fonctionnement est similaire au char réel. L’ETT ne représente pas le pilote, mais offre l’avantage de pouvoir être couplé et donc de pouvoir faire de l’instruction sur le tir peloton à l’arrêt.
– Chaque exercice est enregistré en temps réel sur les serveurs. Il y a donc la possibilité, à l’issue, de rejouer la leçon exécutée précédemment.
Sur le SEE, le rejeu est effectué sur le poste d’observation, avec l’intérêt d’avoir une visualisation en 3D et des caméras virtuelles placées à n’importe quel endroit de la base de donnée. Cela peut être au niveau d’une des optiques du char simulé par exemple, mais aussi sur un engin ENI ou une position particulière du terrain. Le réseau radio est enregistré, et donc le rejeu permet de montrer aux équipages quelles sont leurs erreurs et à quel moment de l’exercice elles se sont produites. Cet outil puissant permet de mettre les élèves face à leurs responsabilités … il montre réellement ce qui s’est passé, et non pas le « ressenti » de l’équipage.
L’utilisation du poste d’observation du SEE peut être découplé du simulateur lui-même, ce qui veut dire qu’un exercice peut être en cours, alors qu’un équipage est débriefé sur ce poste. Cependant cette possibilité est assez peu pratique en régiment, le poste d’observation/rejeu étant situé à proximité immédiate de l’instructeur. Il faut aussi deux instructeurs pour utiliser cette possibilité.
Sur l’ETT, si cette possibilité existe, il n’y a pas de poste d’observation et donc le simulateur est utilisé à cette seule tâche. D’autres part, il n’y a pas non plus de visualisation en 3D et donc l’intérêt est plus limité. L’exercice est rejoué dans les cabines. Dans le cadre d’un exercice peloton cette possibilité peut-être intéressante en phase de débriefing, cependant l’absence de superviseur en régiment est pénalisante, (possibilité d’avoir un ensemble de moniteurs en position haute qui montrent les optique VTI ou VCH des cabines couplées), et en son absence cela doit être fait de manière séquentielle au poste instructeur, limitant ainsi fortement les possibilités pédagogiques.
– Chaque exercice donne lieu à une évaluation chiffrée sous forme de tableau Excel©
Que ce soit le SEE ou l’ETT, à l’issue de l’exercice une fiche de résultats est présentée à l’instructeur. Elle peut être sauvegardée sous forme numérique, ou imprimée.
Il est à noter qu’une cabine ETT est disponible en shelter autonome, permettant ainsi de poursuivre l’entraînement y compris sur un théâtre d’opération extérieur. Cette cabine a été déployée au Liban :
Concernant le SEE, donc avec la cabine pilote indépendante, et la cabine tourelle ( Pour un char, les deux cabines sont forcement indépendantes, afin de rendre compte à l’équipage de tourelle des mouvements de rotation … les sensations sont aussi différentes, car le centre de gravité n’est pas le même ). Ces cabines, outre les sons réels du chars, sont aussi équipées de vibreurs afin de rendre compte le plus précisément possible des régimes moteur, de la différence de sensation lorsque l’on roule sur du dur ou de l’herbe pas exemple.
Voici la cabine de pilotage :
La cabine de tourelle, au fond, derrière la cabine de pilotage :
Le poste instructeur, et le poste subordonné :
Voilà. Cet article est resté assez généraliste, et il est ouvert aux commentaires si vous voulez plus d’explications. Étant expert de ces simulateurs, je pense être en mesure de répondre à vos questions.
Merci.