Réintégration complète de la France dans l’OTAN

L’Assemblée nationale a adoptée le 7 avril le projet de loi autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord.

De ce fait, la France a pleinement réintégré le commandement intégré de l’OTAN.

C’est le 21 février 1966 que la France, sous la présidence du général De Gaulle , avait quitté le commandement intégré de l’OTAN. Les raisons rendues publiques en étaient les suivantes :

Conférence de presse du 21 février 1966

 

Le , lors d’une conférence de presse à Paris, Charles de Gaulle rend public le retrait de la France du commandement intégré de l’OTAN, tout en réaffirmant l’alliance avec les États-Unis : « la France considère, qu’encore aujourd’hui, il est utile à sa sécurité et à celle de l’Occident qu’elle soit alliée à un certain nombre d’États, notamment à l’Amérique, pour leur défense et pour la sienne dans le cas d’une agression commise contre l’un d’eux. » Il avance plusieurs arguments pour justifier le retrait, qui dérivent du fait que la signification de l’Alliance a changé depuis 1949 : « Rien ne peut faire qu’un traité reste valable intégralement quand son objet s’est modifié ». Il développe 5 arguments:

  • Une situation nouvelle amoindrit la menace des pays du bloc de l’est :
« En raison de l’évolution intérieure et extérieure des pays de l’Est, le monde occidental n’est plus aujourd’hui menacé comme il l’était à l’époque où le protectorat américain fut organisé en Europe sous le couvert de l’ O.T.A.N. »
  • L’arme nucléaire soviétique est une situation nouvelle qui remet en cause l’engagement de l’arme nucléaire américaine en Europe :
« La Russie soviétique s’est, depuis lors, dotée d’une puissance nucléaire capable de frapper directement les États-Unis, ce qui a rendu, pour le moins, indéterminées les décisions des Américains quant à l’emploi éventuel de leurs bombes et a, du coup, privé de justification – je parle pour la France – non certes l’alliance, mais bien l’intégration. »
  • La structure intégrée de l’Alliance engage la France contre son gré dans les guerres des États-Unis :
« Des conflits où l’Amérique s’engage dans d’autres parties du monde, comme avant-hier en Corée, hier à Cuba, aujourd’hui au Vietnam, risquent de prendre, en vertu de la fameuse escalade, une extension telle qu’il pourrait en sortir une conflagration générale. Dans ce cas, l’Europe, dont la stratégie est, dans l’ O.T.A.N., celle de l’Amérique, serait automatiquement impliquée dans la lutte lors même qu’elle ne l’aurait pas voulu. »
  • La détention de l’arme nucléaire est incompatible avec les structures intégrées de l’Alliance :
« Au surplus, notre pays, devenant de son côté et par ses propres moyens une puissance atomique, est amené à assumer lui-même les responsabilités politiques et stratégiques très étendues que comporte cette capacité et que leur nature et leurs dimensions rendent évidemment inaliénables. »
  • L’appartenance au commandement intégré de l’Alliance contrevient à l’indépendance nationale :
« Enfin, la volonté qu’a la France de disposer d’elle-même, volonté sans laquelle elle cesserait bientôt de croire en son propre rôle et de pouvoir être utile aux autres, est incompatible avec une organisation de défense où elle se trouve subordonnée. »
« Au total, il s’agit de rétablir une situation normale de souveraineté, dans laquelle ce qui est français, en fait de sol, de ciel, de mer et de forces, et tout élément étranger qui se trouverait en France, ne relèveront plus que des seules autorités françaises. C’est dire qu’il s’agit là, non point du tout d’une rupture, mais d’une nécessaire adaptation. »

Par rapport à cette période, le monde a changé et l’OTAN elle même a dû s’adapter.
La commission de défense de l’Assemblée Nationale a travaillé sur le sujet, et en a fait un rapport.

L’exposé de motifs de la loi est le suivant :

 

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 janvier 2016

PROJET DE LOI

autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord,

PRÉSENTÉ

au nom de M. Manuel VALLS,

Premier ministre

Par M. Laurent FABIUS,

ministre des affaires étrangères et du développement international

(Envoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le protocole de Paris définit le cadre juridique du stationnement des organismes de l’OTAN et de leurs personnels au sein des pays de l’Alliance, en traitant particulièrement le cas des quartiers généraux (QG). Il complète la convention entre les États parties au Traité de l’Atlantique Nord signée le 19 juin 1951 (dite « SOFA OTAN »), qui régit les échanges de personnels entre Alliés et constitue la référence dans ce domaine, mais ne traite pas de la présence de forces proprement dite. L’objet du protocole de Paris est d’assurer un statut aux quartiers généraux militaires interalliés créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, une couverture juridique aux personnels militaires et civils stationnés ainsi qu’à leurs personnes à charge, et précise les garanties et privilèges dont ils bénéficieront (exonérations, protection juridictionnelle, règlement des dommages, …).

Le protocole de Paris fut dénoncé par la France le 30 mars 1966 lorsque celle-ci décida de quitter la structure de commandement intégrée de l’OTAN. La dénonciation est devenue effective le 31 mars 1967.

En 2009, la France a décidé de réintégrer la structure de commandement de l’OTAN. En conséquence, elle a recommencé à accueillir du personnel de l’Organisation dans ses quartiers généraux militaires sans que ses QG ne bénéficient toutefois d’aucun statut international. Seuls des arrangements de circonstance ont permis jusqu’ici l’accueil de personnels de l’OTAN dans les QG situés sur le sol français. L’attractivité du territoire français s’en trouve affectée de même que l’influence française au sein des structures de commandement.

En conséquence, la France a décidé d’étudier les modalités de sa ré-adhésion au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, signé à Paris le 28 août 1952 (ci-après « protocole de Paris »). Au début de l’année 2014, une consultation interministérielle a été lancée par le ministère des affaires étrangères et du développement international en lien avec le ministère de la défense. Toutes les administrations concernées ont approuvé le principe de la ré-adhésion. La France a alors saisi le Conseil de l’Atlantique nord d’une demande de ré-adhésion, conformément à la procédure prévue par l’article XVIII du SOFA OTAN auquel renvoie l’article 16 du protocole de Paris (cette procédure correspond en réalité à une nouvelle « accession » selon les termes de l’article XVIII du SOFA OTAN). Elle a été approuvée à l’unanimité le 21 janvier 2015.

Le protocole de Paris compte seize articles.

L’intégralité du projet de loi, ainsi que le protocole de Paris initial, peut être téléchargé ici :

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La commission de défense a émis un avis motivé sur cette loi.
Cet avis peut être téléchargé ici :

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Et par la décision ci-après, le projet est adopté en première lecture le 7 avril 2016 :

 

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

7 avril 2016

PROJET DE LOI

autorisant l’accession de la France
au
protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux
créés en
vertu du Traité de l’Atlantique Nord.

(Texte définitif)

L’Assemblée nationale a adopté sans modification le projet de loi, adopté par le Sénat en première lecture, dont la teneur suit :

Voir les numéros :

Sénat : 286, 457,458 et T.A. 111 (2015-2016).

Assemblée nationale : 3578, 3615 et 3620.

Article unique

Est autorisée l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, signé à Paris le 28 août 1952, et dont le texte est annexé à la présente loi.


 

Cette adoption ne semble pas avoir entraîné de grands débats et les médias, s’ils s’en sont fait l’écho , n’ont pas spécialement mis en avant cette loi et les modifications que cela pourrait entraîner quand à nos relations avec l’OTAN.

 

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